Chirurgie des glandes surrénales

La glande surrénale : localisation et fonction ? 

Les surrénales sont des glandes au nombre de deux situées en arrière de l’abdomen (rétropéritoine) au dessus des reins, au niveau de la 12ème vertèbre thoracique. Il existe une surrénale droite et une surrénale gauche. Elles mesurent environ 5cm et pèse 5 à 6 grammes chacune. Elles ont une forme en « Y ».

Les glandes surrénales sont indispensables à la vie du fait des différentes hormones qui y sont sécrétées. La glande est formée de deux parties : la médullosurrénale (20%) et la corticosurrénale (80%), elle-même divisée en trois couches. Chaque zone de la surrénale sécrète une hormone différente.

Quelles sont les différentes pathologies de la glande surrénalienne ?

Dans la majorité des cas il s’agit de lésions bénignes (adénome, kyste, hématome ou hyperplasie des surrénales). Parmi les adénomes, on retrouve les adénomes « sécrétants » qui produisent trop d’hormones dont le type dépend de la zone de la surrénale où se développe la tumeur, et les adénomes « non sécrétants ». Plus rarement ils s’agit de tumeurs malignes (métastases, corticosurrénalome, sarcome...).

  • Les adénomes non sécrétants :

Le plus souvent ils sont découverts par hasard sur un scanner réalisé pour autre chose (c’est ce qu’on appelle un incidentalome). On retrouve des adénomes chez 5% de la population. Ces tumeurs bénignes sont souvent de taille inférieures à 5cm et situées d’un seul côté. Les données du scanner suffisent généralement à déterminer le caractère bénin. Il n’y a pas besoin de biopsie. Le traitement chirurgical est rare et ne s’envisage que si l’adénome mesure plus de 4cm ou augmente de volume. Dans les autres cas une surveillance est requise avec un scanner à 6 mois, 2 ans et 5 ans.

  • Les adénomes sécrétants :

Ils représentent 25% des adénomes. Ils produisent en excès des hormones dépendant de la zone de la surrénale à partir de laquelle ils se sont développés.

- L’adénome de Conn : il provoque un excès de sécrétion de minéralocorticoïde responsable d’hypertension artérielle (HTA) sévère. Ils sont fréquents, car on le trouve chez quasiment 10% des patients qui ont de l’HTA. Un bilan sanguin complet sera réalisé ainsi qu’un dosage des hormones dans chaque surrénale pour identifier la surrénale malade (cathétérisme des veines surrénaliennes). L’adénome de Conn augmente le risque cardiovasculaire (AVC, infarctus, arythmie cardiaque) et le risque d’ostéoporose. La chirurgie permet une disparition complète de l’HTA dans 40% des cas et une diminution de nombres de traitement antihypertenseur dans 50% des cas. Le traitement chirurgical est plus efficace chez les patients jeunes qui ont une HTA récente.

- L’adénome cortisolique : il est très rare (< 1 cas / million d’habitants / an) et se développe à partir de la couche fasciculée avec augmentation des sécrétions des glucocorticoïdes. Il est responsable d’un hypercorticisme ou syndrome de Cushing : prise de poids, perte musculaire des cuisses et mollets, amincissement de la peau, vergetures violettes sur les hanche et autour du nombril, hypertension artérielle, diabète, ostéoporose, phlébite, arrêt des règles. Le traitement est chirurgical.

- Il n’existe pas de tumeur bénigne de la surrénale sécrétant des androgènes.

- Le phéochromocytome :

Il s’agit d’une tumeur bénigne développée au dépens de la médullosurrénale, avec un potentiel de cancérisation et métastases dans 5 à 15% des cas. Souvent de découverte fortuite, il est découvert dans un quart des cas sur des signes cliniques : palpitation + sueurs + maux de tête (triade de Ménard), HTA sévère, diabète, pâleur, malaise. Le diagnostic est fait sur des analyses d’urines. La biopsie est formellement contre-indiquée. Un PETscanner sera souvent réalisé. Le traitement est chirurgical. Souvent cette pathologie apparaît dans un contexte génétique particulier qui devra être analysé.

- L’hématome surrénalien : 

Il est découvert le plus souvent sur un scanner réalisé dans les suites d’un traumatisme / coup violent. Un scanner de réévaluation sera réalisé à distance pour évaluer l’évolution (disparition, formation d’un kyste, apparition de calcification). Le traitement n’est jamais chirurgical.

- L’hyperplasie des surrénales :

Il s’agit d’une augmentation de volume des deux surrénales d’origine congénitale. Le plus souvent sans incidence, l’hyperplasie peut parfois provoquer une sécrétion accrue en minéralocortidoïdes ou glucocorticoïdes. Rarement, il s’agit d’une augmentation de volume des surrénales en lien avec avec une pathologie de la glande hypophysaire (glande située dans la boite crânienne).

- Le myélolipome : 

Après l’adénome, c’est la deuxième tumeur surrénalienne la plus fréquente, développée au dépend de cellules graisseuses et sanguines. Dans un cas sur deux, ils sont découverts par hasard sur un scanner réalisé pour autre chose. Sinon ils peuvent être responsables de douleurs dorsales en cas de saignements. Une IRM sera réalisée pour confirmer le diagnostic. Il ne sera réalisé ni biopsie, ni chirurgie pour cette tumeur bénigne.

- Le corticosurrénalome : 

Il s’agit d’une tumeur maligne primitive de la surrénale, rare (0,5 à 2 cas par million d’habitants / an) qui est découverte vers l’âge de 50 à 60 ans sur un tableau sécrétoire multiple (virilisation par excès de testostérone, syndrome de Cushing, HTA). Dans 10% des cas, au stade initial, il est découvert par hasard sur un scanner réalisé pour autre chose. Il est parfois associé à un envahissement de la veine cave qui peut remonter jusqu’au cœur qui complexifie la prise en charge chirurgicale. Un PETscanner sera réalisé. Quand il est possible, le traitement est chirurgical en enlevant la surrénale, les ganglions et obligeant parfois à retirer le rein.

- Les métastases surrénaliennes : 

Elles apparaissent chez des patients le plus souvent déjà suivi pour un cancer. La métastase correspond à une extension du cancer initial (« cancer généralisé »). Les cancers qui sont le plus pourvoyeurs de métastases surrénaliennes sont : le poumon, le rein, le sein, le mélanome, l’estomac et le colon.

Dans quel contexte peut-on me trouver un problème à la surrénale ?

Le plus souvent le diagnostic d’une lésion surrénalienne est fait par hasard sur un scanner de l’abdomen réalisé pour tout à fait autre chose. C’est ce qu’on appelle un incidentalome surrénalien, retrouvé sur 3 à 10% des scanners abdominaux. Il est parfois nécessaire de renouveler le scanner pour en apprécier mieux les caractéristique et orienter vers une tumeur bénigne ou maligne.

A noter que TOUT incidentalome surrénalien doit faire réaliser un bilan biologique complet et au moins une surveillance par scanner à 6 mois si le bilan initial est rassurant.

Certains signes cliniques peuvent évoquer un problème de la surrénale. La présence de ces signes poussera votre médecin à rechercher une pathologie de la surrénale. Voici les signes les plus fréquents:
- Hypertension artérielle sévère résistant à trois traitements antihypertenseurs

- Hypertension artérielle associée à une baisse du taux de potassium dans le sang

- Hypertension artérielle avant l’âge de 30 ans

- Syndrome de Cushing (prise de poids, vergeture pourpre, bosse de bison, fragilité de la peau, perte musculaire, diabète)

Quels examens vais-je devoir réaliser ?

Le scanner de l’abdomen avec injection de produit de contraste dans les veines permet d’analyser l’aspect de la surrénale. Cet examen donnera une excellente orientation pour différencier une tumeur bénigne d’une tumeur maligne.

Le bilan biologique permet de savoir si la tumeur est sécrétante ou non. Le bilan minimal comprend :
- prise de sang (potassium, test de freinage minute du cortisol)
- analyse d’urine (dosages des cathécolamines urinaires et du cortisol libre urinaire sur 24h)

En fonction de ce premier bilan, d’autres examens pourront être réalisés :

- cathétérisme des veines surrénaliennes

- Prise de sang : dosage rapport rénine / aldostérone, calcitonine, PTH, ACTH

- PETscanner (FDG ou DOPA)

- IRM surrénalienne (rarement)

- IRM cardiaque et angioIRM abdominale (si caillot de sang dans la veine cave)

- Examen ophtalmologique

- Tests génétiques

La biopsie de la surrénale n’est jamais réalisée.

Quand est ce qu’une chirurgie de la surrénale me sera proposée ?

Toutes les pathologies de la surrénales ne nécessitent pas un traitement chirurgical. La cause principale d’ablation de la surrénale est l’adénome de Conn.
Les autres indications d’ablation de la surrénale sont :

- Adénome non sécrétant de plus de 4cm ou augmentation de taille

- Adénome cortisolique

- Phéochromyctome

- Corticosurrénalome

- Métastases surrénaliennes selon certaines conditions qui seront discutées avec l’oncologue

- Hyperplasie surrénalienne selon certaines conditions. 

En quoi consiste la chirurgie de la surrénale ?

- Préparation à la chirurgie : 

Le patient rentre à l’hôpital le matin de la chirurgie. Il faut être à jeun 6h avant l’intervention pour les solides et les liquides épais et 2h avant l’intervention pour les liquides clairs. Dans le cas des phéochromocytomes un traitement antihypertenseur sera débuté avant la chirurgie. Dans le cas des adénomes cortisoliques, une injection de corticoïdes sera réalisée la veille et le matin de l’intervention.

- Technique opératoire :

Le plus souvent la chirurgie sera réalisée par voie mini-invasive (coelioscopie), sauf pour les tumeurs volumineuses (adénome > 10cm, corticosurrénalome > 6cm, envahissement du rein). Cette technique permet en plus des petites cicatrices, une récupération plus rapide, moins de douleurs et moins de complications postopératoires. Selon la tumeur et les difficultés durant

l’intervention, le chirurgien peut décider de « convertir » en réalisant une large incision sous les côtes. Parfois, l’ablation du rein peut être nécessaire pour enlever la tumeur de la surrénale.
Le plus souvent il n’est pas laissé de drain dans l’abdomen, sauf pour les tumeurs volumineuses.

 

- Hospitalisation :

La plupart du temps une hospitalisation de 1 à 5 jours pour la surveillance de la tension artérielle, de la prise de sang et du taux de sucre dans le sang. La reprise de l’alimentation est normale dès le soir de l’intervention sans régime particulier. La reprise de la mobilisation est débutée dès le soir de l’intervention. Dans certaines conditions un traitement substitutif par glucocorticoïdes ou minéralocortidoïde sera débuté.

Dans l’adénome de Conn il est fréquent qu’un traitement antihypertenseur soit poursuivi.
Dans certains cas, l’hospitalisation sera poursuivie quelques jours en service d’endocrinologie pour maîtriser les différents retentissement hormonaux.

- Risques liés à la chirurgie :

Le risque principal est le saignement qui peut survenir au cours de l’intervention car les surrénales sont collées aux gros vaisseaux (veine cave, veine rénale). Les autres risques sont :

- conversion (ouverture de l’abdomen par une grande cicatrice)
- plaies des organes voisins (foie, rate, colon, pancréas, rein, diaphragme) - abcès cutané ou profond
- défaut de cicatrisation
- phlébite ou infection pulmonaire
- insuffisance surrénalienne
- douleurs postopératoires

Quelles sont les suites de l’intervention une fois à la maison ?

Selon l’activité professionnelle, un arrêt de travail de 3 à 6 semaines sera remis par le chirurgien. La reprise des activités sédentaires pourra être réalisée dès le lendemain de l’intervention. Il est conseillé d’éviter le port de charges de plus de 5 kilos pendant les 15 premiers jours

postopératoires. Les activités sportives pourront être reprises progressivement au bout de trois semaines.
La marche est recommandée dès le premier jour postopératoire pour diminuer le risque de phlébite.

Un traitement anticoagulant par des injections sera débuté en postopératoire pour 10 à 28 jours en fonction de la pathologie.
Concernant les cicatrices, il s’agira de fils sous la peau qui se résorbent tout seuls et qui ne nécessitent pas de soins infirmiers (sauf pour les syndrome de Cushing où des agrafes seront mises devant la fragilité cutanée et le risque de réouverture des cicatrices)

Qu’est ce que l’insuffisance surrénalienne chronique et suis-je à risque d’en développer une après la chirurgie ?

L’insuffisance surrénalienne correspond à une diminution ou une absence d’activité de la surrénale qui ne produit pas assez d’hormones et particulièrement les glucocorticoïdes. Dans certaines pathologie, et surtout dans les adénomes cortisoliques, la surrénale qui n’est pas malade se met au repos. Après l’ablation de la surrénale malade elle peut mettre un peu de temps à redémarrer : il s’agit d’une insuffisance surrénalienne chronique le plus souvent TRANSITOIRE. Durant cette période une supplémentation en corticoïdes (Hydrocortisone 30mg/jour) sera débutée pour minimum 4 semaines. Ce traitement ne sera arrêté qu’après une prise de sang (test au synacthène) et un contrôle auprès d’un endocrinologue.

Cette insuffisance surrénalienne chronique peut être permanente dans les cas exceptionnels où les deux surrénales sont retirées ou chez les patients opérés d’un adénome cortisolique avec des signes d’hypercorticisme marqués depuis plusieurs années.

Qu’est ce que l’insuffisance surrénalienne aiguë ? Quand peut-elle se développer et que dois-je faire ?

Durant cette période d’insuffisance surrénalienne, le risque est de développer une poussée d’insuffisance surrénale aiguë. Il s’agit d’une urgence médicale car le pronostic vital est engagé. Les symptômes sont :

- des douleurs abdominales
- des troubles neurologiques (confusion, convulsion)
- Chute de la tension artérielle
- Une chute très importante du taux de sucre dans le sang (hypoglycémie profonde)

Ces poussées surviennent lorsque l’organisme est agressé alors que les surrénales fonctionnent au ralenti. Les facteurs de risque de développer cette poussée sont :
- un épisode de fièvre / une infection
- une intervention chirurgicale

- Une déshydratation après un effort physique violent ou des diarrhées importantes - une très forte émotion...

Dans ces conditions, il est recommandé de prendre immédiatement 2 comprimés d’hydrocortisone puis de doubler le traitement par hydrocortisone jusqu’à résolution des symptômes et jusqu’à avis de votre médecin traitant. Si vous êtes porteur d’une insuffisance surrénalienne chronique ou sous traitement par hydrocortisone après une chirurgie de la surrénalien et que vous présentez des symptômes d’insuffisance surrénalienne aiguë vous devez vous rendre aux urgences immédiatement ou contacter votre médecin généraliste.

 

Contenu modifié le 04/05/23